Les pouvoirs du maire en matière de nuisances causées par un débit de boissons

Avec le développement des manifestations sportives ou culturelles et l’interdiction de fumer à l’intérieur des établissements publics et privés recevant du public, le pouvoir de police administrative du maire est particulièrement sollicité. Le juge administratif a été récemment confronté à un litige relatif sur cette question des nuisances sonores causées par deux débits de boissons (CAA de Nantes, 4ème chambre, 31 mai 2016, req. n° 14NT02117).

Afin de lutter efficacement contre les nuisances sonores, le maire est invité à respecter les principes suivants :
– La conciliation peut être recherchée afin de mettre en œuvre une procédure de règlement amiable des conflits entre les auteurs du trouble et les personnes qui sont victimes de ce dommage. Pour obliger l’auteur des nuisances à respecter l’accord trouvé, le plaignant peut demander au juge d’instance de lui donner force exécutoire. En cas d’échec, le conciliateur a la capacité de déclencher une action judiciaire.
– Le maire peut également adopter un arrêté afin de faire cesser le trouble avec mise en demeure des auteurs de ces nuisances. Si cette mise en demeure n’est pas respectée, le maire peut faire dresser un procès verbal par un officier ou un adjoint de police judiciaire voire même par un agent de police municipale compétent.
– Dans tous les cas, le maire a l’obligation de faire cesser les nuisances sonores en utilisant les outils de mesure appropriés.
– L’absence d’intervention du maire pour faire cesser une nuisance sonore est une cause de mise en jeu de la responsabilité de la mairie. Le seul moyen d’atténuer sa responsabilité administrative est de mettre en œuvre les différentes mesures susceptibles de faire cesser le trouble. A ce titre, le maire doit :

  1. Engager une discussion avec les services de l’Etat pour suspendre les dérogations horaires qui sont souvent accordées par le préfet à des débits de boissons. Le maire ne peut intervenir qu’afin d’aggraver les mesures préfectorales.
  2. Mesurer le niveau, l’intensité et la fréquence des nuisances sonores avec des outils appropriés.
  3. Evaluer l’impact de ce trouble sur la tranquillité publique, en l’occurrence le voisinage.
  4. Interdire temporairement le stationnement sur les places concernées par les nuisances.
  5. Déployer les services de police municipale de la ville sur les lieux du trouble pour rappeler les règles de tranquillité publique.
  6. Notifier des mises en demeure afin de faire cesser ces troubles.
  7. Limiter les heures d’ouverture d’un débit de boissons.
  8. Prescrire des travaux d’insonorisation dans les immeubles qui sont à l’origine des nuisances.
  9. Suspendre ou interdire la vente des boissons alcoolisées à certaines heures et dans certains périmètres.
  10. Interdire l’activité à l’origine du trouble.
  11. Respecter de manière stricte le principe de proportionnalité en adoptant des mesures provisoires et spécifiquement adaptées aux troubles concernés.

Article L2212-2 du Code général des collectivités territoriales
La police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment :
(…)
2° Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes accompagnées d’ameutement dans les rues, le tumulte excité dans les lieux d’assemblée publique, les attroupements, les bruits, les troubles de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique »

Article R1334-31 du Code général des collectivités territoriales
« Aucun bruit particulier ne doit, par sa durée, sa répétition ou son intensité, porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l’homme, dans un lieu public ou privé, qu’une personne en soit elle-même à l’origine ou que ce soit par l’intermédiaire d’une personne, d’une chose dont elle a la garde ou d’un animal placé sous sa responsabilité ».

Article R1334-33 du Code de la santé publique
L’émergence globale dans un lieu donné est définie par la différence entre le niveau de bruit ambiant, comportant le bruit particulier en cause, et le niveau du bruit résiduel constitué par l’ensemble des bruits habituels, extérieurs et intérieurs, correspondant à l’occupation normale des locaux et au fonctionnement habituel des équipements, en l’absence du bruit particulier en cause.
Les valeurs limites de l’émergence sont de 5 décibels A en période diurne (de 7 heures à 22 heures) et de 3 dB (A) en période nocturne (de 22 heures à 7 heures), valeurs auxquelles s’ajoute un terme correctif en dB (A), fonction de la durée cumulée d’apparition du bruit particulier.